Les câblos ne
sont pas dans les câbles, mais... MARTINE TURENNE . Les Affaires . 09-04-2011 (modifié le 07-04-2011 à 15:11) Que ce soit pour regarder un film ou un match de cricket indien, le câble perd chaque jour un peu de terrain face à un concurrent qui offre souplesse et bas prix : Internet.Les internautes consomment la télé sur le Web, ou webtélé, par les voies légales (par l'entremise d'iTunes, Netflix et Tou.tv) ou de « contournement », comme le CRTC appelle le piratage dans son document de présentation de son récent forum « Orienter les approches réglementaires de demain ». Quelle que soit la manière, la technologie permettra aux consommateurs d'accéder à un choix plus vaste et plus personnalisé... sans passer par les câbles des Bell, Vidéotron ouRogers. Il n'y a pas péril en la demeure, mais ceux-ci doivent s'adapter au marché pour survivre. 1- Rester maître des tuyaux Les câblos vont demeurer encore plusieurs années des « agents de connectivité », pour reprendre l'expression de Gilbert Ouellette, président de RADAR service médias et gestionnaire du Regroupement des producteurs multimédia (RPM) : « D'une manière ou d'une autre, ils vont tenter de demeurer l'intermédiaire entre le client et le contenu. » « Bell et Vidéotron ont les tuyaux, c'est leur force, dit Normand Turgeon, professeur de marketing à HEC Montréal. Que le contenu soit acheminé par le câble ou par Internet, ils ne seront pas perdants. Pas nécessairement gagnants, mais pas perdants. » Les deux gros de l'industrie sont à la fois des câblodistributeurs et des fournisseurs Internet. Ils contrôlent donc la bande passante. Et pour regarder des émissions par Internet, celle-ci est très sollicitée. « Les câblos vont protéger leurs revenus en augmentant les tarifs de leur bande passante, dit Normand Turgeon. C'est comme être propriétaire du Pont Champlain : on peut mettre des péages là où on veut. » Lorsque Netflix a débarqué au Canada l'automne dernier, Rogers a abaissé la capacité de bande passante sur certains forfaits Internet, note cependant Anthony Hémond, avocat analyste en télécommunication radio-diffusion à l'Union des consommateurs. Rogers rend ainsi moins attrayant pour ses abonnés Internet l'abonnement à Netflix ou, à tout le moins, le rend plus limité. Netflix vient de répliquer en réduisant des deux tiers le volume de données normalement consommé pour le visionnement d'un film. « Nous avons donc pris cette mesure afin d'éviter des frais de données excédentaires. Aux États-Unis, où ces frais existent aussi, les limites sont très généreuses. Ainsi, Comcast offre 250 gigaoctets pour 40 $ par mois », explique Reed Hastings, chef de la direction de Netflix.
2- Baisser les prix Lors d'une présentation devant un parterre invité par le magazineInfopresse, le mois dernier, Damien Lefebvre, vice-président exécutif, services conseils, chez w.illi.am/, a créé un petit émoi lorsqu'il a indiqué qu'un forfait câble, téléphonie et Internet haute vitesse coûte quelque chose comme 39,99 $ en France. C'est près de trois fois moins qu'au Canada, réputé pour avoir les tarifs parmi les plus élevés du monde. Cela peut inciter des consommateurs à se passer du câble, dit Damien Lefebvre. Selon lui, c'est le modèle de prix qui risque le plus de changer avec l'arrivée de nouveaux acteurs Internet comme Netflix et Hulu. Les câblos réagissent déjà. Bell casse ses prix de manière musclée. Et pour Damien Lefebvre, une récente initiative du Club Vidéotron « est un premier symbole » : pour 9,99 $ par mois, le client a accès à un nombre illimité de films réguliers (sans dépasser 3 locations à la fois). « C'est une réaction directe à l'arrivée cet automne de Netflix au Canada », dit-il. Si le prix est juste, les consommateurs paieront leur dû. Contrairement à l'information, qu'ils souhaitent gratuite, ils se disent prêts - dans les sondages - à payer pour du contenu de divertissement, note Normand Turgeon, que ce soit pour des séries, des films ou du sport. « Les gens veulent payer, dit Anthony Hémond. Mais il faut une offre raisonnable. » 3- Créer son propre contenu Une des manières pour les câblodistributeurs de mettre la main sur ce contenu exclusif tant convoité est évidemment de posséder celui qui le crée et le diffuse. Aux États-Unis, l'achat par le câblo Comcast d'une participation de 51 % de NBC ( General Electricen conserve 49 %) a été vu par l'industrie comme une façon, justement, de contrer l'effet Web. « On observe du côté américain une intégration verticale », dit Normand Turgeon. Au Canada, ce modèle est déjà bien implanté : Vidéotron fait partie de l'empire Quebecor Media ; Rogers possèdeCitytv, Shaw a acheté Canwest et Bell, CTV. Selon la rumeur, Bell pourrait acquérir V Télé pour accroître son contenu francophone. « Stratégiquement, ce serait une excellente alliance, car Bell a un problème de contenus, dit Anthony Hémond. De distributeurs de contenus, les câblodistributeurs deviennent de plus en plus des diffuseurs et des créateurs de contenus. » Un frein à l'accessibilité pour les consommateurs, croit-il, puisque chacun de ces distributeurs réserve une partie de son contenu propre à ses seuls abonnés. |
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